Time Fades Away

vendredi 23 novembre 2007

Boulevard des Capucines

Le jour où j'ai acheté le billet j'étais un peu comme un gosse. Dessus l'adresse indiquait: Boulevard des Capucines. Jusqu'à ce jour, ce n'était pour moi qu'une rue du Monopoly. Boulevard des Capucines 32 0000: j'achète!! J'aimais bien avoir les verts, Breteuil, Foch, Capucines et les jaunes aussi, davantage que Champs Elysées et Rue de la Paix. J'aimais bien quand, après avoir tiré une carte Chance ou Caisse de Communauté, il y avait: reculez de trois cases, et que ça tombait sur Boulevard des Capucines et que je pouvais dire: chez moi! Ça fait un moment que j'ai pas fait un Monopoly, dix ans peut-être. Je me souviens y jouer encore étudiant pour meubler les longues après-midis, avant de passer les soirées aux tarots.

"Boulevard des Capucines
Ton nom qui tout là-haut scintille
Est le même que le mien"
C'est une chanson du nouvel album d'Etienne Daho, L'Invitation. Ce titre au départ avait tout pour déplaire quand j'en ai entendu parler la première fois. Il se trouve qu'à force d'écouter l'album, qui est réussi, et ça fait plaisir de le dire, que Daho revient avec un bon disque, un qui restera, un de ses trois meilleurs avec Eden et Corps et Armes, je trouve la chanson poignante et juste. Au final au lieu d'un déballage sur la place publique que n'importe quel journal à sensation aurait exploité, les choses sont énoncées avec beaucoup de pudeur.

Boulevard des Capucines où on me déposa ce soir là, lundi 12, il y avait cinq groupes à l'affiche. Un rendez-vous manqué me contrarie, alors en attendant dans la fosse, je bombarde de sms, oubliant consciencieusement que je sature ma mémoire et vide ma batterie. L'Olympia, où je mettais les pieds pour la première fois, sa moquette et son rideau de velours rouge, l'Olympia, que je voyais plus grand dans mes rêves, va savoir pourquoi. Les choses sérieuses ont commencé avec Beirut, qui était attendu de pied ferme par le tout-Paris et son rendez-vous manqué, l'an dernier au même endroit, un pétage de câble l'ayant fait renoncer à monter sur scène. Tout le monde est conquis par cette fanfare, ces instruments insolites, cuivres, trompettes, sax baryton, mandolines, hukuleles, ce petit jeunot, avec son teint blafard et ses mèches brunes désordonnées, s'exprimant dans un français parfait et sans accent, qui joue de la trompette.

C'est la troisième fois que je vois Andrew Bird et chaque fois il y a un musicien de plus. Ce soir là ils sont trois, il est accompagné d'un batteur qui assure aussi les claviers et d'un guitariste bassiste. Tout devient un peu trop technique, un peu trop virtuose pour le coup. Les morceaux ont tendance à s'étirer afin d'atteindre je ne sais quelle plénitude. On lui fera signe en coulisse que la pendule tourne, et le morceaux suivants, Heretics et The Birthday Song qui concluera le set, retrouveront leur architecture de base, directe simple et efficace. Dois-je l'avouer, mais je le préférais seul sur scène.

23 heures arrivent, je commence à m'inquiéter pour le dernier RER. Devendra Banhart et ses chevelus montent sur scène. J'appréhendais l'accoutrement et la touche qu'ils allaient avoir. A mon grand étonnement, ils sont incroyablement sobrement vêtus, élégants, presque beaux. Devendra Banhart, les cheveux attachés, porte un pantalon cigarette, un pull en V bleu marine et un gros noeud papillon à pois blanc. Son guitariste a un costume beige avec petit veston, les cheveux longs lâchés, très shampooing Timotei. Ils ont débuté le set par Seahorse, un des morceaux les plus Timotei, 3 en 1, du dernier album Smokey Rolls Down Thunder Canyon. 65 minutes plus tard, je quittai les lieux heureux, léger, d'un pas leste et véloce vers la bouche de métro la plus proche.

mercredi 21 novembre 2007

dimanche 18 novembre 2007

When it's good sure is good

La salle s'est levée comme un seul homme. Nous étions assis jusqu'alors, chose plutôt rare pour un concert, et depuis une bonne heure et demi, nous encaissions. Et alors qu'il quittait la scène, nous applaudissions à tout rompre, biens décidés à ne pas en rester là. Nous étions assis, tout comme lui, tout comme ses deux guitaristes, son batteur. Seuls son bassiste et sa violoniste ont joué debout. La formation était déployée en arc de cercle, et il était côté cour. Puis il est revenu, chaleureusement rappelé, nous nous sommes rassis. Lui l'était toujours, assis, engoncé, tout voûté dans son fauteuil roulant, la guitare en bandoulière non pas avec une sangle, mais un simple bout de corde. Il avait un bonnet vissé sur la tête qui surlignait ses paupières gonflées, ses yeux bridés par quelque probable artifice. L'homme ne tient pas en place, gigote sans cesse, a du mal à contrôler certains gestes de son bras gauche, il doit souffrir. Il tient son plectre entre le pouce et l'index de sa main droite, ses autres doigts sont morts. Cela n'affecte en rien la musique qui sort du pincement des cordes de nylon.

Le groupe, la bande du Thee Silver Mt. Zion, a mis en place les instruments. Lui est arrivé, sur la pointe des pieds, si j'ose dire, préparer son coin et dès que tout le monde était prêt, les lumières se sont éteintes. Ça a commencé doucement puis la tension est montée crescendo au fil des titres. Le dernier album North Star Deserter y est passé tout entier. Cela faisait longtemps que je n'avais ressenti quelque chose d'aussi intense, ni pareille émotion lors d'une prestation scénique, le frisson me parcourant régulièrement les bras puis le dos, les coups portés sur la grosse caisse me résonnant dans le corps tout entier, la respiration profonde parce que coupée, vidé, comme si, bien qu'assis, j'avais couru dix kilomètres.

Nous debout à la fin, lui assis à nous saluer, d'un mouvement de la tête, visiblement satisfait de ce qu'il nous avait donné et de ce qu'on lui procurait en retour à cet instant. Il s'est passé quelques chose, un fluide magique entre le groupe, une alchimie parfaite, une osmose totale entre la scène et nous spectateurs. Vic Chesnutt se produisait à La Cigale, ce 13 novembre. C'est Ruby Tuesday, classique stonien, qui a conclu le set, précédé d'Over dont quelques mots résument bien ce qui s'est passé:

"When it's good sure is good
Yes and when it's good it's great
When it's great it's oh so wonderful
But when it ain't it ain't."


Un extrait, dix jours plus tôt à Munich.

Après ces quelques heures hors du temps, la vie continuait au dehors. Le froid commençait à gagner le boulevard Rochechouart et les rues de Pigalle illiminées de leurs néons chamarrés. Les trains avaient cessé de circuler. Je passerai sous silence la première partie, aussi prestigieuse fût elle prestigieuse, Okkervil River, qui a pourtant livré un prestation honnête, épaulés d'un fan-club enthousiaste, mais bien terne et fade à côté de ce qui a suivi.

vendredi 9 novembre 2007

I'm not there

Étudiants, gaziers, cheminots, enseignants, magistrats, fonctionnaires, marin-pêcheurs, stewards et hôtesses, j'allais oublier, qui manque t'il: les routiers pour bloquer les dépôts de carburants? L'immobilier qui pousse une génération entière à d'endetter jusqu'à ses vieux jours, le prix du carburant qui plombe, jusqu'aux nouilles, dont on ne sait pas si on va arriver à s'en remplir la panse cet hiver tant la récolte de blé mondiale a été chiche. De partout monte une sourde grogne.

Il en faudra plus pour me décourager de monter à la capitale demain, pour en découdre avec tout ça. Vous allez voir ce que vous allez voir parce que j'ai pas l'intention de me laisser pourrir ces vacances comme les précédentes. Oui mais là j'avais une excuse, les éléments s'étaient ligués contre pour nous pourrir l'été.

I'm Not There, c'est le prochain film de Todd Haynes. Je suis en train de découvrir la BO, c'est comme si tous les copains s'étaient réunis le temps d'un double album. Avec dans le désordre: Sonic Youth, Calexico, Jim James de My Morning Jacket, Cat Power, Yo La Tengo, Iron & Wine, Jeff Tweedy de Wilco, Mark Lanegan, Sufjan Stevens, Tom Verlaine, Stephen Malkus des regrettés Pavement, Antony & The Johnsons...
Si d'aventure le film était loupé, on peut se rabattre sans risque sur la BO, qui elle, est une réussite. Pub!



Allez, le devoir m'appelle...
I'm not there, I'm gone.

mercredi 7 novembre 2007

J'ai vu New York/ New York USAAA

Je ne résiste pas à vous donner des nouvelles de notre Tsarine qui nous a laissé orphelins de la blogosphère depuis quelques mois et qui nous manque tant.



Cher SM,
J'ai profité d'un mouvement de grève à Air F. pour faire un petit shopping à NYC. J'ai fait un tel raffut à l'aéroport que les grévistes se sont remis en poste séance tenante. Et j'ai pas attendu que le président français me propose de me ramener avec son avion perso. Tu pourras dire à RVT que, moi aussi, je me suis offert un Abercrombie d'enfer et qu'il va en être malade de jalousie quand il va me le voir dessus.
Des bises à toi et tes nombreux lecteurs...
N

Merci pour la carte. On a hâte de voir nous aussi. On t'embrasse très fort, on t'aime beaucoup.

dimanche 4 novembre 2007

Classement vertical



Lips.

"Tu l'auras toujours ta belle gueule
Tu l'auras toujours ta superbe
A défaut d'éloquence."

Tel - Bashung

Comme le lait sur le feu

Le compte à rebours est enclenché. S'aventurer dans une galerie marchande un samedi après-midi, même si le programme laisse à désirer en temps ordinaire, devient un cauchemar. Ils sont tous de sortie, à grouiller dans les rayons achalandés. Tout regorge, tout déborde pour faire envie, pour créer un besoin éphémère, nous donner le sentiment de manquer de quelque chose, plus spécialement pour la fin d'année, allez savoir pourquoi. La cohue, le bruit, la chaleur, le piétinement produisent sur moi l'effet contraire. Je suis rentré en laissant en place cette profusion de belles marchandises qui auraient bien aimées que je leur tende le bras et leur ouvre le portefeuille.



J'ai mis du lait dans la casserole, une gousse de vanille fendue en deux et porté le tout à ébullition. J'ai guetté le moment. Quand la surface se met à bouillonner, quand l'écume monte d'un seul coup. J'adore saisir cet instant, où il faut vite retirer le lait du feu juste avant qu'il ne déborde. La musique de Wilco est un peu ça: comme le lait sur le feu. On guète l'instant où elle pourrait déraper, s'emballer, passer par dessus bord, mais comme par miracle, elle reste toujours contenue. Et la fièvre qui l'anime et la fait bouillonner retombe juste avant d'en mettre partout à côté.



Des années que nous étions destinés à nous rencontrer, des années à reporter l'instant, et finalement la rencontre avec Sky Blue Skye comme une évidence. Deux extraits ce nouvel album, du dvd de l'édition limitée que je ne puis regarder, ça m'apprendra à faire venir des disques de Miami... J'ai saupoudré en pluie du riz lavé à grande eaux, laissé cuire à feu doux une bonne demi-heure, rajouté de sucre en fin de cuisson et le zeste d'un citron. J'ai fait du riz au lait au bout du compte.